Théâtre - "Le mythe de Sisyphe" - Texte: Albert Camus- Adaptation et interprétation : Pierre Martot

Le mythe de Sisyphe

Adapté du texte d’Albert Camus

Adaptation et interprétation : Pierre Martot

Jouer sur une scène de théâtre “Le mythe de Sisyphe” d’Albert Camus est en soi une conception difficile à imaginer. Pierre Martot s’est formé comme comédien auprès d’Ariane Mnouchkine, Philippe Adrien ou Jean-Claude Fall. Auprès de ces grands maîtres du théâtre, sans doute, a-t-il appris à se lancer des défis et à imaginer des choses infaisables. Pour la première fois, “Le mythe de Sisyphe” est adapté et joué au théâtre. Voilà c’est fait !  Un vrai défi réussi !…  

L’absurde de la condition humaine

Sur le plateau vide et à peine éclairé, la voix surgit de l’ombre. Portés par la voix grave de Pierre Martot, les premiers mots nous emportent directement dans le texte de Camus et posent en priorité que toute l’étrangeté du monde surgit de l’absurde, car “ le monde nous échappe…et au fond de toute beauté, gît quelque chose d’inhumain”. Dès les premiers mots se construit la pensée au centre de toute l’oeuvre de Camus : l’absurde de la condition humaine, la nécessité de l’action et les tentatives souvent maladroites pour y parvenir. Une pensée centrale qui s’organise autour de la nostalgie de l’unité et de l’appétit d’absolu qui aiderait à dépasser l’absurde.

L’homme révolté, l’écrivain et l’acteur

Théâtre - "Le mythe de Sisyphe" - Texte: Albert Camus- Adaptation et interprétation : Pierre Martot
Photo mh Le Ny

Le déplacement de l’acteur, sa marche le long des murs, autour de la scène, sa présence plantée au centre du plateau pose la pensée de l’auteur et la souligne en fonction de la signification souterraine qui surgit des mots. “ Chez Albert Camus, nous signale Pierre Martot, la pensée est indissociable de l’action. Avec lui trois figures donnent chair à la réflexion : “l’homme révolté”, l’écrivain et enfin l’acteur”. Pierre Martot assume dans son jeu puissant et précis ce cheminement et nous invite à le suivre. Sans effets scéniques, la parole du texte de Camus s’élève par sa voix, s’installe dans l’espace vide du plateau pour nous envahir. Sisyphe devient notre frère et le rocher qu’il pousse est celui qui représente son destin et le nôtre. “C’est le chemin qui mène aux visages de l’homme qu’il s’agit de trouver” nous rappelle Camus. Un chemin où l’homme tentera d’inscrire ses réponses, comme un appel à exister dans un monde qui y reste sourd et où le bonheur est un chemin escarpé voire impossible à franchir . 

Un théâtre du mouvement 

Les mots et la pensée philosophique s’inscrivent ici dans le mouvement propre à l’acte théâtral. Un mouvement sans démonstration. La scène devient le monde qui nous entoure et où la pensée se déploie librement. Avec qui, le dialogue se fait-il ? interroge l’auteur. Avec Dieu ? Soi-même ? Le néant ?  De nombreuses questions souvent sans réponses, alors que l’appétit de conquête se heurte à des murs, que l’univers est indéchiffrable et que l’homme s’y confronte avec brutalité. Chaque mot, chaque phrase surgit de l’oeuvre originelle. La conception du jeu théâtral, les hésitations, les colères parfois, mettent en place la théâtralité du texte comme une confrontation avec le silence du plateau et de la salle. Sur la scène du Lavoir Moderne Parisien, les murs en pierres deviennent des “oreilles” sourdes auxquels répondent seulement le silence et la lumière diffuse sur le plateau. La révolte débouche sur une prise de conscience : celle du destin de l’homme.  Dans cette marche sans fin, la pensée finit par progresser, la révolte s’apaise, l’expérience sensible nous rapproche de Sisyphe, poussant inlassablement son rocher qui, une fois au sommet, retombe dans le vide. Le sens de cette action est démenti par l’absurde de la vie et de la mort. Pourtant continuer à croire à la liberté, à se confronter à tout ce qui peut l’entraver et l’arrêter nous permet de croire enfin ( peut-être ?) à nous-mêmes. 

“La littérature est ma patrie, la grandeur est dans la contestation et le sacrifice(…)affirme Camus, la lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir un cœur d’homme. Il faut imaginer Sisyphe heureux”. Cette magnifique adaptation qui respecte la force, la poésie et le mouvement de l’oeuvre  nous a transformés, nous en spectateurs heureux.   



Le Mythe de Sisyphe / © Editions Gallimard 
Texte : Albert Camus 

Adaptation et interprétation : Pierre Martot

Collab. artistique/ lumières : Jean-Claude Fall 

  • Assistanat : Baptiste Meilleurat 

Durée estimée : 1 h 20


Lavoir Moderne Parisien
– 75018 Paris

Mercredi 11 au dimanche 29 octobre
à 19h en semaine
15 h le dimanche 

Tournée :
Moulin d’Andé :
Samedi 25 novembre
19h –  27430 Andé 

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