Théâtre : Les consolantes Texte & Mise en scène : Pauline Susini

Les Consolantes

Texte & Mise en scène : Pauline Susini

Attentats du 13 novembre 2015 à Paris. Un sujet grave et traumatique auquel se consacre la Compagnie des Vingtièmes Rugissants, sous la direction de Pauline Susini qui a écrit le texte et le met en scène. Sur un plateau nu, “Les Consolantes” se rattachent à la tragédie grecque…Une forme qui ambitionne de croiser l’évènement contemporain aux récits mythologiques…

De la réalité documentaire à la fiction théâtrale

En partant des entretiens intimes des témoins des attentats du 13 novembre 2015, collectés par l’Institut d’Histoire du Temps Présent et en lien étroit avec le procès, Pauline Susini explore les formes de consolations et de reconstructions intimes et collectives huit ans après les évènements. Le point de départ de la pièce que Pauline Susini envisage d’écrire s’attache dans un premier temps aux récits de l’expérience vécue par les victimes lors de ces attentats. Pourtant la matière fictionnelle qu’elle envisage de créer s’attache aussi à la relation des évènements lors de l’enquête et des procès qui en ont été les conséquences.
Raconter ceux qui ont été oubliés, évincés, mis de coté,(…) et à qui on refuse le statut de victime, explique l’autrice et metteure en scène, comme les policiers de la BAC 75, entrés au Bataclan contre les ordres, à qui on a demandé de taire ce qu’ils ont vécu. [Je veux raconter dans la pièce] ces expériences ordinaires d’un événement extraordinaire (…) C’est peut- être aussi la seule manière d’explorer, à hauteur de femme et d’homme, les possibles retours à la vie”.
L’expérience de chaque protagoniste qui a vécu individuellement le traumatisme devient ainsi la mémoire d’un évènement qui s’inscrit aussi dans la mémoire collective à travers les témoignages et les procès qui ont suivi. Cependant, la fiction théâtrale se trouverait amoindrie si ces matériaux ne s’ouvraient pas, à partir de cette histoire intime et collective, vers ce qui constitue la condition humaine: la mort, la souffrance, la perte et le retour à la vie.

Consolation et reconstruction intime et collective

Théâtre : Les consolantes Texte & Mise en scène : Pauline Susini
Photos Christophe Raynaud de Lage

Échappant à la volonté de “trier” les témoignages, Pauline Susini s’est attachée à donner leur place aux invisibles. 12 récits douloureux portés par quatre comédiens, sur le plateau nu et dégagé de tout accessoire, viennent se raconter et témoigner de leur expérience.
Le titre de la pièce,“Les Consolantes”, évoque un rattachement non contestable à la tragédie grecque construite à partir de récits fondateurs qui “racontent les tourments de la Cité et sa capacité à se reconstituer”. Derrière les avocats, les médecins, les psychologues et les historiens qui consolent les victimes des attentats de 2015, surgissent les figures mythiques de Charon, le passeur qui transportent les morts sur son bateau au coeur des Enfers. À travers le récit d’une adolescente, la figure de Perséphone, qui, après avoir connu l’obscurité des Enfers revient à la lumière. Une autre évoque le fil d’Ariane qui l’a aidé dans son parcours chaotique.

Et la suite ?…

Théâtre : Les consolantes Texte & Mise en scène : Pauline Susini
Photos Christophe Raynaud de Lage

Porté par une présence musicale très fine, le texte, à ces moments, devient plus poétique et les Consolantes se profilent derrière les témoignages et les aléas de la reconstruction de chaque témoin. Certains passages sont très beaux et pleins de poésie. On y retrouve le cheminement de l’action dans les tragédies grecques. On passe du récit de la péripétie à la reconnaissance, puis à la prise en charge d’une catharsis qui conduit au retour à la vie. Mais comment oublier la constatation de cette mère qui vient de perdre son fils dans l’attentat ? “Lorsqu’on perd ses parents, dit-elle, on dit qu’on est orphelin, si on perd son époux ou son épouse, on est veuve ou veuf. Si on perd son fils, il n’y a pas de mot pour le dire”.
En dépit des qualités des comédiens qui proposent un jeu sensible et engagé du début à la fin, la mise en scène des dernières actions de la pièce évoquent de façon banale la vie joyeuse retrouvée. Sur le plan théâtral, cette fin trop longue introduit selon moi, une fausse légèreté dans un récit qui avait ouvert vers la profondeur et la présence des mythes anciens comme bases de reconstruction de la vie. On perd alors de vue les Consolantes. Car, même si apparemment la vie reprend le dessus, si la joie peut refaire surface, certaines morts sont-elles consolables? Dans le récit des mythes, cette limite apparaît dans la façon de raconter. Après le récit du drame, le retour à la joie et à la vie se construit avec cette limite qui introduit alors d’autres chemins de compréhension.

Théâtre : Les consolantes Texte & Mise en scène : Pauline Susini
Photos Christophe Raynaud de Lage

Les Consolantes

Texte et Mise en Scène : Pauline Susini

Collaboratrice artistique : Florence Albaret

Avec : Noémie Develay-Ressiguier, Sébastien Desjours, Sol Espèche, Nicolas Giret-Famin


Durée : 1 h 45

  • Scénographie : Camille Duchemin

  • Création lumière : César Godefroy

  • Création sonore : Loic Leroux

  • Costumes : Clara Hubert

Théâtre 13 Bibliothèque – 75 013 Paris

Du 30 janvier au 9 février 2024 – Du lundi au vendredi à 20h, le samedi à 18h

Autre Date : 16 mars 2024 – l’ECAM, Kremlin-Bicêtre (94)

A VENIR EN 2024


  • Anis Gras Le Lieu de l’autre, Arcueil (94)

  • Nouveau Gare au Théâtre fabrique d’arts, Vitry-sur-Seine (94)
  • Le Majestic – Scène de Montereau, Montereau (77)

  • Les Passerelles – Pontault-Combault (77)

  • Théâtre de Grasse scène conventionnée, Grasse (06)
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