Après les ruines
Texte et mise en scène : Bertrand Sinapi
La ville de Metz a signé une charte d’amitié avec la ville d’Alep en Syrie alors que la guerre y fait rage en 2014. Bouleversée par la violence de la guerre en Syrie, la Compagnie Pardès Rimonim, localisée dans cette ville crée des liens avec des Syriens, réfugiés à Metz, notamment avec l’autrice syrienne, Wejdan Nassif dont le très beau texte en arabe débute la pièce "Après les ruines"…
Une suite de rencontres…
Centres d’accueil de demandeurs d’asile, rencontres auprès des populations des quartiers, foyers séniors répartis sur le territoire régional de la ville de Metz ou dans l’atelier El Warsha mis en place à l’Espace Koltès – Scène conventionnée pour les écritures contemporaines, c’est au sein de ces institutions que Bertrand Sitrapi a eu l’idée d’écrire “Après les ruines”, une pièce créée au sein de sa compagnie Pardès Rimonim.
Au premier plan de ce projet se trouve la dimension européenne de l’équipe artistique unie par la volonté de lutter contre les discriminations. Les quatre comédiens et le musicien viennent de France, de Belgique, du Luxembourg et d’Allemagne. Sur le plateau, la pièce se raconte en français, en Allemand et en arabe sur-titrés. Avec des réfugiés, des personnes d’âges, d’origine et de milieux sociaux très variés s’est organisé, avec les comédiens, un travail autour de deux questions essentielles : qu’est-ce que signifie l’exil et comment peut-on en parler ? De quelle façon ces gens pris dans l’étau du départ en raison de conflits compliqués dans leur pays peuvent-ils s’en sortir, survivre et comment faire entendre leurs voix ? C’est autour d’un questionnement incessant, parfois naïf et ensuite poussé que se construit la pièce.
Le choc des mondes…
Alors que je suis français, quel serait mon comportement si je devais m’installer en Allemagne sans en parler la langue et que le fonctionnaire face à moi ne parle pas un mot de français ? C’est à partir de cette situation que nous est présentée directement la position de l’exilé au début de la pièce.
Nous venons d’un monde différent du vôtre, mais sommes-nous si-différents ? Pourquoi, pour vous, est-ce si difficile de nous accueillir ? Pour les étrangers, les questions se succèdent…Arriver en Europe, c’est payer des impôts, avoir une liberté d’expression et de religion, mais comment comprendre ces aspects lorsqu’on arrive d’un pays aux règles sociales et à la langue différentes ? Quels sont les droits fondamentaux à appliquer en tout premier lieu ? Au-delà du questionnement des exilés sur les règles sociales du pays d’accueil se posent aussi, pour les fonctionnaires, la question de l’adaptation permanente à trouver pour les expliquer de façon simple.
Un monde en questionnement
Deux aspects surgissent dans la construction de cette pièce : d’une part, dans l’écriture, les anecdotes autour de chemins de vie différents et un déroulé scénographique précis qui s’inscrit dans la poésie.
La dramaturgie de la pièce se construit autour d’un questionnement incessant : celui des réfugiés, mais aussi celui des gens du pays d’accueil. Ce format d’écriture provoque une grande instabilité du récit et des situations. Des dialogues incertains conduisent à la confusion, à la répétition et à une forme de banalité du récit d’où surgit parfois l’ennui. Quelle est l’histoire de ces personnages ? Où veut nous conduire ce questionnement incessant et ennuyeux ?
Il faut dépasser ces impressions et se laisser porter par le mouvement sur un plateau où des dossiers encombrent une table centrale. La fable de la pièce se construit autour d’une scénographie précise, portée par la mobilité de lumières étonnantes. Sur les tentures blanches qui ferment le plateau, les ombres inquiétantes s’allongent, grandissent comme portées par une multitude de questions. Dans cet espace, apparaît même, sous la forme du chant, la forme inquiétante du Roi des Aulnes qui invite les enfants à venir se distraire dans son royaume où ils finissent par trouver la mort. Dans les bureaux anonymes où les exilés sont obligés de se rendre, naissent aussi les mouvements de la rencontre, les solutions qui émergent, la bienveillance qui calme les peurs et finit par offrir une ouverture et des solutions dans le pays d’accueil. Peu à peu, les ombres reprennent une taille normale qui redessine un monde où de nouveaux repères sont en train de se profiler. Naissent alors des “villes miniatures” qui ouvrent des espaces vers des imaginaires nouveaux. ”Et alors “maintenant qu’est-ce qu’on fait?” Dernière question de la pièce. Silence des mots et comme un alter ego, les mouvements de la musique qui ouvre des chemins inconnus où peuvent se profiler à nouveau l’espoir, l’écoute et le partage. Peut-être …
Après les ruines
Texte et mise en scène : Bertrand Sinapi
Avec : Amandine Truffy, Katharina Bihler et Bryan Polach
Contrebasse live et traitement éléctro-acoustique : Stefan Scheib
- Dramaturgie : Amandine Truffy et Emmanuel Breton
- Composition: violoncelle enregistrée André Mergen- thaler
- Dispositif sonore : Lionel Marchetti
- Création lumières : Clément Bonnin
- Dispositif scénique et régie : Matthieu Pellerin
- Scénographie et objets : Goury
Durée estimée : 1h 30
Remerciements à Wejdan Nassif et tous les participants de l’atelier El Warsha–
Spectacle vu au Théâtre de “La Comète” à Châlons sur Champagne – Avril 2024
TOURNÉE
L’agora à Metz (57) – 5 juin 10h00 et 20h00 – 6 juin 10h00 et 14h00 – 7 juin 10h00 et 14h00
Du 2 au 21 juillet 2024 : au 11•Avignon – Festival Avignon off
4 décembre 2024 – MJC Calonne de Sedan (08)