Théâtre - Vertige de Guillaume Vincent

Vertige

Texte : Guillaume Vincent
en collaboration avec les interprètes

Mise en scène : Guillaume Vincent

L’espace toujours étonnant du Théâtre des Bouffes du Nord à Paris ! Les murs qui racontent l’histoire du lieu et gardent dans leurs lézardes les répliques des pièces de Shakespeare mises en scène par Peter Brook qui, autrefois, régnait sur le lieu. Guillaume Vincent et les jeunes comédiens issus d’une des promotions de l’École du Nord ne l’ont pas oublié et y font une brève allusion dans “Vertige” la pièce étonnante qu’ils y présentent.  Un titre qui ne dément pas ce qu’il promet : le déséquilibre permanent !… 
Théâtre - Vertige de Guillaume Vincent
Photos © Simon Gosselin

“Vertige” : 2001-2021…Allez on enchaîne !…

Sur le plateau vide, un garçon et une fille. Ils entrent et s’assoient à la table au centre et commencent à lire un texte qu’ils découvrent. Répliques, didascalies, notes de mise en scène …Ils lisent tout et cherchent une orientation de jeu théâtral…Maladresses, timidité, propositions en accord total avec les indications, mais…Cinq autres personnes entrent sur le plateau…
“Vertige” raconte l’histoire de sept jeunes gens, quatre filles et trois garçons, qui ont pour ambition de devenir comédiens. Nous sommes en 2001 et c’est leur première année de formation à l’école de théâtre… Année des découvertes, des rencontres et des vertiges…Vertiges des histoires personnelles qui se confrontent à celles du temps qui passe entre 2001, l’année des commencements et 2021, celle des désillusions. Vertige des désirs, vertige des histoires que l’on invente, que l’on imagine ou que l’on vit dans toute leur réalité…Au centre de tout cela, les vertiges du théâtre et de la représentation…
Septembre 2001. On n’avait encore ni adresse mail, ni portable…Et “Loft Story” , l’émission de télévision préférée des Français prétend raconter le réel ! À l’école de théâtre, Feydeau est au programme et on répète “N’te promène donc pas toute nue”. On est plus précisément le 11 Septembre 2001. À New York, au même moment, les tours jumelles viennent d’exploser… Le Sida se propage…2002. Jean-Marie Le Pen se trouve face à Jacques Chirac pour les élections présidentielles…Inquiétudes…

2021. Le confinement s’invite dans les répétitions, enferme cette jeunesse qui voit la chute de ses projets de théâtre. 2022. Marine le Pen est au second tour des élections présidentielles. Cela émeut peu de gens !

Théâtre - Vertige de Guillaume Vincent
Photos © Simon Gosselin

Théâtre dans le théâtre

Tout le travail de Guillaume Vincent, à la fois auteur et metteur en scène de ce spectacle, a été d’inclure les sept comédiens dans l’écriture du texte. “ En mesurant l’écart entre ma génération et la leur, je leur propose d’écrire une fiction. On aborde classiques et contemporains. On se plonge dans “Les Vagues” de Virginia Woolf qui fera partie du spectacle…”
Ce texte raconte l’histoire de six personnes de l’enfance à l’adolescence puis à l’âge adulte avec cette interrogation en filigrane, de quoi est fait le théâtre ? Partant de là, Guillaume Vincent travaille sur une fiction qui va inclure d’autres extraits de pièces ( Tchekhov, Arne Lygre, Sarah Kane, Brecht, Dostoïevski), se centrer aussi sur des extraits du roman “Les vagues” de Virginia Woolf et inclure des textes écrits à partir d’improvisations au plateau. Le texte qui en résulte oscille entre la réalité de souvenirs réels, l’improvisation et des textes d’auteurs de théâtre. Se trouve précisé aussi un rapport au monde qui, pour toute une génération, a basculé en 20 ans d’une manière profonde vers des directions parfois inconnues. À peine sortis de l’adolescence, les sept jeunes comédiens savent de façon intuitive que leur vie ne sera plus la même.
“La pièce, précise Guillaume Vincent, s’est écrite collectivement comme un roman de formation où nos héros et héroïnes vont faire l’expérience de la vie à travers leur métier, leurs histoires réelles, inventées, jouées. Il est question de théâtre, des textes du répertoire qui les traversent, qui trouvent un écho jusque dans leur intimité”. Tout le spectacle se déroule selon un processus d’initiation qui confond le monde réel et le jeu théâtral. Ainsi une scène de dispute entre Platonov et sa femme Alexandra Ivanovna devient une réalité pour les deux acteurs qui la jouent, effaçant la frontière entre la scène et la réalité.

Théâtre - Vertige de Guillaume Vincent
Photos © Géraldine Aresteanu

On nous oubliera, mais ça n’aura plus d’importance…

Vertige du théâtre, de la représentation, du désir et de l’amour. A travers une mise en scène qui refuse la facilité et qui est basée sur un travail magnifique de la scénographie et de la création des lumières, le jeu des sept acteurs, est plein d’une totale générosité et d’une grande créativité. Le texte oscille en permanence de la trivialité la plus crue à une grande émotion poétique, de la confidence à la réflexion politique ou théâtrale.
Entre le public et les comédiens sur le plateau, un dialogue subtil se crée. On passe de la violence à l’écoute bienveillante, des certitudes aux doutes, de l’amour à la cruauté parfois. La succession des histoires toujours émouvantes joue sur les fragilités de chacun, sans mièvrerie et sans insistance. Le spectacle dure 2 h 30 et pourtant il se déroule, du début à la fin, selon le même éblouissement, la même rigueur du récit et d’un jeu théâtral plein de fougue. Surgissent à trois moments, au cours de la pièce, six enfants qui font songer à ceux que furent ces jeunes comédiens en train de grandir et en filigrane évoquent les générations futures.
“On nous oubliera, mais ça n’aura plus d’importance !” souligne un des comédiens-personnages. Deux décennies, c’est long et c’est court. Passer de l’ambiguïté entre histoire des comédiens et celle des personnages est un aller et retour entre l’appréhension du théâtre et la réalité des souvenirs qui nous constituent. Également “entre des destins qui se croisent, se heurtent, se séparent et se retrouvent”. Ne pas démêler le réel de la représentation est le vrai challenge de cette pièce ambitieuse “écrite comme un roman d’apprentissage, un roman de formation et un conte initiatique”.
On nous oubliera, mais ça n’aura plus d’importance !…Oui, et alors ? Nous sommes ici et maintenant entourés de couleurs, de lumières sublimes et dans ce spectacle nos souvenirs de spectateurs se télescopent aussi avec ceux qui nous sont racontés sur la scène, nous incluant, à notre insu, dans ce spectacle tout en vertiges successifs.



Vertige

Texte : Guillaume Vincent en collaboration avec les interprètes

Mise en scène : Guillaume Vincent

Avec 🙁 issus de la promotion 6 de l’École du Nord) : Suzanne de Baecque, Adèle Choubard, Maxime Crescini, Simon Decobert, Joaquim Fossi, Solène Petit, Rebecca Tetens et six enfants en alternance

  • Dramaturgie: Constance de Saint Remy
  • Scénographie: Hélène Jourdan
  • Lumières: Sébastien Michaud
  • Collaboration artistique: Marion Stoufflet
  • Costumes : Lucie Ben Bâta, assistée de Gwenn Tillenon
  • Son: Tom Menigault
  • Création Marionnette : Carole Allemand Delassus et Einat Landais
  • Maquillage et coiffures : Mityl Brimeur

Durée estimée : Environ 2 H 30


Du jeudi 23 mars au samedi 8 avril 2023
Du mardi au samedi à 20h,
SAUF
Samedi 25 mars : matinée à 15h et soirée à 20h30
Dimanche 2 avril : matinée à 16h

Théâtre des Bouffes du Nord – 75010 Paris

TOURNÉE

12 au 14 avril – La Comédie, Centre Dramatique National de Reims
25 au 27 avril – Centre Dramatique National de Besançon Franche-Comté
6 au 9 juin – TNB – Centre Européen Théâtral et Chorégraphique, Rennes
Juin (date à venir) : Festival d’Anjou


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