La Nuit des Rois
Texte: D’après Shakespeare
Mise en Scène : Benoît Facérias
C’est accidentellement, nous dit le comédien Benoît Facérias, qu’il a rencontré le théâtre de Shakespeare à travers “La Nuit de Rois”. “Ce texte, dit-il, m’a immédiatement interpellé par sa simplicité et sa poésie". Benoît Facérias est comédien et “La Nuit des Rois” est sa première mise en scène. Un spectacle dynamique qui ressemble à cette troupe qui défend un théâtre populaire et ne s’interdit rien.
Une nuit endiablée…
Dans un carré dessiné sur la scène, l’un joue de la guitare, l’autre marque le rythme sur une caisse en bois, sur le côté une comédienne attend…Un plateau totalement nu…Les spectateurs s’installent pour voir une pièce de Shakespeare……
“L’histoire commence par un naufrage, nous explique une narratrice,Viola et Sébastien sont jumeaux, ils sont sauvés mais ne le savent pas et se retrouvent séparés…” Viola pour survivre se travestit en garçon, devient Cesario et se met au service du Duc Orsino. Dès le départ tout est très compliqué car Orsino aime Olivia qui aime Viola, qui aime Orsino.
Lumière au centre du plateau, des silhouettes faiblement éclairées apparaissent dans l’ombre, la scène s’anime… “La Nuit des Rois” commence et tout peut arriver nous annonce le Fou qui surgit du fond de la salle. Nous n’en sommes qu’au début intervient une fois encore la “comédienne-chef” de choeur (Céline Laugier ou Nolwen Cosmao) qui précise que quand elle parle de “la douce Olivia “ qu’elle est Olivia ! Vous suivez toujours ? Pas de problème, vous allez suivre!…
Au centre, le jeu théâtral
La compagnie “Les Lendemains d’Hier”, fondée par Benoît Facérias et Arnaud Raboutet a tout d’abord joué Shakespeare, en extérieur sur les places des villes et des villages. Sur la scène de théâtre, utilisant l’espace de la salle et jouant sur la complicité avec les spectateurs, la troupe conserve cette agilité, cette aisance et cette spontanéité du théâtre de rue. Débarrassée des accessoires, du décor, la scénographie habituelle s’efface et se fond dans la nudité du plateau. Le jeu impeccable des six comédiens, qui ouvre toujours vers la drôlerie et le partage avec le public, est mis en valeur et se déroule dans un équilibre toujours précaire qui nécessite une écoute et une solidarité totale sur le plateau.
Au travers de ces choix dramaturgiques, le texte de Shakespeare impose sa poésie et laisse entrevoir les mystères d’une nuit où tout peut arriver. La vérité du monde réside dans cette nuit où dans l’ombre rôde la tromperie, où les servantes peuvent aimer les seigneurs, où les hommes peuvent être des femmes déguisées. Une réflexion sous-jacente au théâtre lui-même est au centre de cette pièce de Shakespeare.
Benoît Facérias et ses acolytes se servent du jeu théâtral pour nourrir cette réflexion. S’emparant du texte, les acteurs nous emmènent dans un monde fou à lier où tout peut arriver et nous perdre. Mais en fait, on s’y retrouve très bien dans cette nuit endiablée faite de musique, de magie et de rêves…L’intendant Malvoglio est le seul à se faire berner jusqu’à la fin.
15 personnages… 6 comédiens…
Toute la force de cette comédie réside dans le triangle amoureux qui est le sujet de la pièce et le changement de personnage et de jeu des comédiens. Ils sont six ( en fait 2 équipes de six) et dans une distribution en alternance ils jouent les quinze personnages principaux de la pièce. L’adaptation et la mise en scène de Benoît Facérias est des plus audacieuses car reposant uniquement sur le jeu des acteurs. Au son des guitares, on chante (du Queen ou du Cabrel), on danse, on s’interpelle dans un jeu totalement excentrique où rien ne semble interdit. Sur une scène nue, sans décor ni accessoires, par des changements de costumes quasi immédiats, surgissent les personnages, s’organise l’intemporalité d’une nuit où tout peut arriver. Autour du personnage de Feste le Fou se met en place un jeu délirant soutenu par les beuveries de ses deux compères: Sir Toby et Sir Andrew. Si les autres personnages semblent définis dans leur rôle et leurs attentes, le Fou est imprévisible et au centre du jeu. Il surgit toujours là où on ne l’attend pas, change sa voix proposant des solutions inattendues et menant une danse qui décalent les actions. Les comédiens sont tous remarquables et tous les citer semble indispensable, histoire de s’y retrouver n’est-ce pas ?…
Il y a un fou (Pierre Boulben ou Melchior Lebeaut) avec un bonnet à pointes rouge fluo, Orcino (Ugo Pacitto ou Clément Paul Lhuaire) amoureux éconduit et très tenace, Toby (Benoît Facerias ou Maxime Bocquet) toujours entre deux verres, Malvoglio (Arnaud Raboutet ou César Duminil) un personnage ridicule. Deux femmes dans la distribution Justine Morel (en alternance avec Joséphine Thoby) passant du rôle de Cesario-Viola à celui de Maria, un elfe incontrôlable.
Nous avons vu le spectacle à Paris, au Théâtre du Lucernaire où il joue jusqu’au 27 Août. Ne le ratez pas, si vous êtes au Festival d’Avignon : il est programmé du 7 au 29 Juillet 2023 au Théâtre du Roi René.
La Nuit des Rois
Texte d’après : William Shakespeare
Mise en Scène : Benoît Facérias
Assistante à la mise en scène: Nolwen Cosmao
- Scénographie: Marine Brosse
- Lumières :Raphaël Pouyer
- Costumes : Thomas Denis
- Décors : Florian Guerbe
Avec en alternance : Pierre Boulben / Melchïor Lebeaut , Benoît Facerias / Maxime Bocquet , Céline Laugier / Nolwen Cosmao, Ugo Pacitto / Clément Paul Lhuaire, Arnaud Raboutet / César Duminil, Joséphine Thoby/ Justine Morel
Durée : 1 h 10
Du 21 juin au 27 août 2023– Du mercredi au samedi à 18h30- Le dimanche à 15h
Théâtre du Lucernaire – – 75 001 Paris
TOURNÉE
Du 7 au 29 Juillet 2023 : FESTIVAL D’AVIGNON / Théâtre du Roi René
- 19 Novembre 2023 : Templeuve
- 23 Novembre 2023 : Palais des Congrès de Versailles
- 14 Mai 2024 : Villeparisis