Au seuil de la vie, théâtre

Au seuil de la vie

Texte:  Nära Livet de Ulla Isaksson 

Traduction : Marie Hägg Allwright, Alice Allwright

Adaptation & Mise en scène : Hélène Darche

Suède. Les premières lois sur l’avortement datent de 1938, l’éducation sexuelle à l’école est obligatoire depuis 1956, les femmes ont le droit de vote depuis 1921...Stockholm, 1958. À partir d’une nouvelle de Ulla Isaksson et du film d’Ingmar Bergman, tous deux suédois, Hélène Darche met en scène “Au seuil de la vie”. Une pièce intimiste, portée par la parole de quatre femmes de milieu et d’âge différents qui partagent la même chambre, dans une maternité, pendant vingt-quatre heures. 
  

Dans l’attente de l’enfant 

Au seuil de la vie, théâtre
© Fred Atlan

C’est la nuit, Cecilia arrive désespérée à la maternité. “Le père n’en voulait pas et je ne me sens pas assez forte pour le garder toute seule” dit-elle en parlant du bébé dont elle avorte à l’infirmière qui la reçoit. Dans la chambre qu’elle va partager avec deux autres femmes, elle rencontre Stina, la solaire, prête à accoucher et qui attend impatiemment la naissance de son bébé dans l’euphorie la plus totale et la plus exubérante. Dans l’autre lit, c’est Hjordis, qui ne sait pas encore si elle veut ou non garder le bébé, après l’échec d’une tentative d’avortement “maison” pour lequel elle est hospitalisée. Syster Britta, l’infirmière, veille sur toutes les trois, comme une grande soeur ou une mère rigoureuse, bienveillante et discrète.

Pour ces trois femmes d’âge et de milieu différent, – dans un univers de lumière bleue qui évoque le rêve et l’univers du ventre maternel – la connexion s’établit spontanément autour de ce bébé “ en construction” ou prêt à naître qui occupe tout l’espace physique et mental, tout en occultant le monde extérieur. Ces trois femmes qui ne se sont jamais rencontrées, partagent dans le rire et le questionnement l’intimité de la naissance, de la grossesse désirée ou non, mais aussi l’inquiétude, la colère ou l’exaltation. Dans cet univers uniquement féminin, où les hommes évoqués par instants restent à l’extérieur, se racontent dans la nuit les secrets et les inquiétudes. La réception d’un bouquet de fleurs sera le signe discret de leur présence évoquant le lien qui unit le couple et le statut social : un bouquet explosant de couleurs pour Stina la trop heureuse, un bouquet de bon goût, monochrome et un peu convenu pour Cecilia, un pauvre petit bouquet anonyme envoyé par ses collègues de travail pour Hjördis. 

Dans une mise en scène qui favorise la simplicité et le jeu spontané des actrices, Hélène Darche met l’accent sur des questions qui existaient déjà dans la Suède des années 30, mais qui trouvent seulement aujourd’hui un écho troublant et novateur : la maternité vécue comme un libre choix et non comme une obligation, la liberté du couple à égalité pour les hommes et les femmes, la disposition libre de son corps…On retrouve dans cette mise en scène l’atmosphère des films de Bergman et ceux des années 50 en noir et blanc. Les murs laiteux, les lits de la maternité et les costumes blancs créent une intimité dans l’espace, ce qui permet les confidences et les fous-rires évoquant ceux de pensionnaires dans un dortoir. L’histoire de chaque femme est à la fois un partage et une confidence tout en maintenant une distance discrète et pourtant présente.  

Au seuil de la vie, théâtre
© Fred Atlan

La parenthèse de tous les possibles

La mise en scène se découpe entre les moments crus et l’évocation intime de la grossesse et l’accouchement, l’histoire personnelle compliquée, solitaire ou entourée de chaque femme. Sans ostentation, chaque comédienne ouvre les portes à son personnage, laisse entrevoir par touches la vie présente dans chaque instant en dépit des tristesses, des cruautés supportées ou des choix difficiles.  “Entre scènes réalistes, moments crus et moments tendres, souligne la metteure en scène, des silhouettes flottent, blancs fantômes baignés dans du bleu : comme une évocation du placenta, la parenthèse de tous les possibles”. Au-delà des cruautés incompréhensibles de l’existence, trouver, quoi qu’il en coûte, le moyen de survivre et de trouver un sens à sa vie. Une bien jolie pièce portée par quatre comédiennes pleines de grâce et de tendresse. 

Au seuil de la vie

Texte: “Nära Livet” de Ulla Isaksson
Éditions l’Arche Éditeur 

Traduction : Marie Hägg Allwright, Alice Allwright

Adaptation & Mise en scène : Hélène Darche

Avec : Pernille Bergendorff, Pénélope Driant, Sofia Maria Efraimsson, Gwladys Rabardy 

Durée : 1 h 20

  • Lumières : Arnaud Bouvier 
  • Décor: Hélène Darche, Sébastien Ehlinger 
  • Musique : Jason Mayer 
  • Costumes traditionnels : Céline Ayel

Du 1er au 24 mai, du dimanche au mardi à 19h15


Les Déchargeurs

3 rue des Déchargeurs -75 001 Paris


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